Enfant, mes parents accueillaient des réfugiés à la maison

Je me nomme Adjoua. Je suis Ivoirienne de nationalité et j’ai suivi la formation responsable logistique de l’action humanitaire avec Bioforce.

Pour moi, devenir humanitaire ça a vraiment commencé lorsque j’avais presque 20 ans et il y a plusieurs éléments qui m’ont vraiment poussée à prendre cet engagement au sérieux.
Le premier, c’est d’abord la convivialité qu’on avait à la maison : ma famille avait une tradition d’accueil, mes parents, lorsque j’étais enfant, accueillaient des réfugiés, les hébergeaient chez nous, à la maison. On a vraiment partagé les vivres, partagé des vêtements. J’étais déjà plongée dans un cadre humanitaire, sans même le savoir.

La deuxième chose qui m’a poussé à vraiment prendre conscience de cette vocation, c’est que j’ai été réfugiée moi-même au Liberia pendant la crise qu’a connu mon pays dans les années 2010. [En décembre 2010, 14 000 Ivoiriens ont dû fuir vers le Libéria voisin pour échapper aux violences post-électorales dans leur pays. Certains ont été empêchés par des groupes armés de traverser la frontière. Le Conseil des droits de l’homme de l’ONU a adopté à l’époque une résolution dénonçant les « atrocités » commises après la présidentielle, qui ont fait 173 morts dans la semaine qui a suivi les élections]

Il a fallu fuir, je suis devenue réfugiée

J’ai été une réfugiée et ce n’était pas du tout facile. Quand la crise a commencé, moi j’étais à Abidjan, à l’université, et ma mère m’a demandé de revenir dans notre ville natale, une ville qui fait frontière avec le Libéria, au sud-ouest de la Côte d’Ivoire. Les tirs ont commencé quelque temps après. Ils ont commencé à tirer dans notre voisinage, et une voiture est venue nous chercher pour nous déposer au bord d’un affluent du Cavally. Là, on devait prendre une pirogue pour traverser et maintenant commencer à marcher pour aller au Liberia.
Il faut dire que mon village, heureusement, n’est pas loin du Libéria. C’est la dernière ville de la Côte d’Ivoire qui fait frontière. C’est juste le fleuve Cavally qui nous sépare. Ma mère a eu un accident, et elle avait un problème au pied donc du coup, elle ne pouvait pas marcher. Ça, c’était vraiment ma plus grande inquiétude. Comment faire pour qu’on puisse arriver à temps pour ne pas être pourchassés ? Parce qu’on a vu des personnes mourir dans la lagune qui s’échappaient, on entendait les tirs. Voilà, on ne sait pas si les personnes sont juste à côté de nous, mais on voyait des tirs, on voyait de la fumée.

Moi, je voyais de la fumée en l’air, je pensais que c’était un avion. Mais ce n’était pas un avion c’étaient les tirs, les combats. Nous sommes arrivés dans un village. On a eu des pourparlers pour s’arrêter, manger un peu, avoir la force pour continuer.
Et on nous a dit « Ah, ils arrivent, ils arrivent » et du coup, on a laissé la nourriture. On a tout mis sur notre tête et on a recommencé à marcher. J’avais mal parce que ma maman n’arrivait pas à marcher. Tout le monde partait, mais je ne pouvais pas laisser ma mère, elle n’arrivait pas à marcher.

Finalement, nous sommes arrivés. Nous sommes arrivés dans une des villes du Liberia qui est très proche de la Côte d’Ivoire juste de l’autre côté de la frontière.

Nous avons vécu dans une tente avec plusieurs personnes, des enfants qui pleuraient. On peinait à trouver de quoi manger. C’était quand même difficile, c’était quand même vraiment difficile. Et puis voilà, nous sommes restés plusieurs semaines et par la suite, nous sommes rentrés chez nous, au pays. Mais voilà, on a vu des personnes mourir, quoi. Mais bon, c’est comme ça. Ça s’est passé.

L’envie de devenir humanitaire est devenue une évidence

Après cela, j’ai postulé aux Nations unies où j’ai été ouvrière. Je faisais tout ce qui était maçonnerie, construction, implantation de la base vie des équipes. Et là, j’ai commencé à aimer un métier que je ne connaissais pas. Je suis quelqu’un qui aime beaucoup travailler sur le terrain : mes parents m’ont éduqué aux travaux champêtres, tout ça, je le faisais. La machette, la daba, je le faisais. Donc du coup, aller dans un milieu humanitaire comme les Nations unies, dans le domaine du bâtiment où on a vraiment besoin d’énergie, on a besoin de physique, c’était pour moi, ça me plaisait, j’aimais vraiment faire cela, toucher à tout. Vu mon engagement, le sérieux que je mettais dans le travail, on m’a fait monter pour me mettre à la logistique. Sans vous mentir, je ne savais rien de la logistique et je ne savais même pas ce que c’était, la logistique. Moi j’ai fait une formation en géographie et je me retrouve dans la logistique, avec peu d’informations sur les ONG. Et tout d’un coup, j’ai commencé à aimer ce métier. Je ne savais rien du métier de logisticien, alors j’ai commencé à faire des recherches sur Internet. Le logisticien c’est une personne qui sait tout faire, et automatiquement, je me suis dit que ça cadre avec mon comportement, ma façon d’être. Moi, j’adore tout faire. Quand il y a un boulot, que ce soit la plomberie ou autre, je me jette là-dedans.

Le logisticien c’est la personne au centre d’une mission humanitaire. J’ai commencé à réfléchir, me documenter et j’ai commencé à en parler à mes amis, à mes collègues. Je voulais rentrer dans l’humanitaire, je voulais aussi apporter ma pierre à l’édifice. Je voulais aussi aider ceux qui sont dans le besoin parce que j’ai été aussi dans le besoin, j’ai été réfugiée et j’ai déjà apporté mon assistance à plusieurs personnes. Du coup, je prends la résolution à partir de ce moment d’entrer dans la logistique humanitaire. Et c’est ainsi que cette envie d’humanitaire, vraiment, s’est développée. Je suis entrée à Bioforce, d’abord en 2014 pour une formation courte, à Bobo Dioulasso au Burkina Faso, puis j’ai intégré la première promotion du nouveau centre de Dakar au Sénégal en formation diplômante de Responsable Logistique. En sortant de Bioforce, je suis devenue superviseur logistique avec l’ONG Alima.

 


* Le prénom a été modifié.

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