Les enfants, c’est un des combats qui me touche le plus

Mon stage humanitaire a été incroyable, je l’ai vraiment adoré ! C’était la 3e année consécutive que cette structure accueillait des stagiaires de Bioforce et j’en avais eu de très bons échos. L’association s’appelle Caritas Djibouti, c’est un centre d’accueil de jour pour les enfants des rues. On pourrait comparer ça à un centre de loisirs en France sauf qu’il y a en plus la partie nourriture, distribution de vêtements, distribution de tous les besoins nécessaires. Nous devions faire un stage en logistique et finalement nous nous sommes retrouvées à faire plus d’animation que de logistique. Moi j’ai adoré ça, les enfants c’est un des combats qui me touche le plus et un des publics avec lesquels j’accroche le mieux.

Tous les jours il y avait plus de 120 enfants dans un immense centre dans lequel il y avait toujours de la musique, des gens qui dansent, quelques bagarres aussi avec des enfants qu’il faut séparer mais globalement il y avait toujours beaucoup de vie. Je pense que c’est ce que je cherche dans l’humanitaire, de la vie, de l’humanité et de la simplicité. A Djibouti c’était vraiment incroyable : j’ai des scènes de repas où on préparait la nourriture, on avait une énorme marmite de pâtes qui débordait, avec des gants on prenait à la main les pâtes et on préparait les assiettes souvent avec des enfants qui venaient également nous aider à les préparer. Il y avait toujours cette ambiance joyeuse avec de la musique et des enfants qui s’amusaient. Ça m’a beaucoup marqué parce qu’en dehors de ça, ce sont des enfants qui sont à la rue et qui sont dans un climat super violent, d’insécurité et quand ils entrent à Caritas ils retrouvent ce côté enfant. Ils font des bêtises d’enfants, ils s’amusent, ils font les pitres et ça fait vraiment très plaisir. J’ai essayé d’apprendre leur langue, malgré tout tu te rends compte que le langage non-verbal est vraiment très important, et que même sans parler la même langue tu peux rigoler et chanter super fort. Encore plus avec des enfants parce que tout est spontané et ils vont toujours trouver ça normal que tu viennes leur parler alors qu’un adulte un peu moins.

L’une des choses très marquantes ça a également été la violence. Dès qu’il y a bagarre on ramasse un caillou par terre et on commence à se jeter des cailloux. Pour nous c’était très choquant de se dire qu’ils en arrivent là à cet âge-là, c’est véritablement le témoignage de la violence dans laquelle ils vivent tous les jours. Ce sont des enfants qui sont déjà adultes, qui ont toujours été plongés dans un climat d’insécurité et qui ont dû prendre des responsabilités dès leur plus jeune âge. On avait essayé de faire croire à la petite souris à un enfant qui avait perdu sa dent, il ne nous a jamais cru et il nous a dit « arrêtez de me prendre pour un débile », il avait 6 ou 7 ans. Alors qu’un enfant en France tu lui fais croire ça il y croit tout de suite. Le fait qu’ils n’aient plus cette naïveté, cette insouciance, c’était très choquant. Mais c’était également une grande joie de pouvoir leur offrir un environnement sécurisant où ils peuvent retrouver leur enfance et se détendre au sein de Caritas. Les enfants savaient que dans le centre il y avait des règles : on ne se bat pas, on ne se drogue pas, et s’ils le faisaient ils ne pouvaient pas passer la journée dans le centre. Donc ça se passait souvent très bien, mais ne maitrisant pas la langue il y a sûrement des choses que je ne remarquais pas.

Mon tuteur avait toujours les bons réflexes

C’est plus quand on sortait à l’extérieur que l’on découvrait des choses, ce qui prouvait aussi qu’à l’intérieur du centre ils pouvaient se lâcher. J’allais beaucoup à la station-service pour acheter des gâteaux, des boissons, des cartes d’abonnement téléphonique. Sur le chemin je croisais toujours des enfants qui m’appelaient, eux leur maison c’est la rue donc forcément tu en croises si tu te balades. En revanche à l’extérieur il n’y a pas de loi donc j’en croisais certains totalement défoncés, je voyais des bagarres ou certains enfants déjà endormis par terre. Un jour j’ai été véritablement choquée, je rentrais de l’association avec une collègue jusqu’à chez nous, il y avait environ 150m de marche, nous étions en train de discuter et j’ai trébuché. En regardant par terre j’ai vu que j’avais trébuché sur un enfant qui dormait, un enfant que je connaissais bien et avec qui j’avais un très bon lien. Ça m’a bouleversée. Je me souviens qu’on l’avait réveillé parce qu’il était sur une grande avenue, en lui disant de se cacher ailleurs. Dans la rue les enfants se font souvent arrêter par la police sans aucun motif. Ce sont des enfants des rues, ce sont des Éthiopiens donc là-bas ils n’ont aucun droit. La police les relâchent quand ils veulent, ils peuvent y passer un jour comme une semaine, ils peuvent être torturés, être de corvée pour nettoyer la prison, porter des choses lourdes…

On a eu un cadre très sécurisant, avec un tuteur qui était attentif à nos réactions, nos gestes et nos paroles pour ne pas nous mettre en danger ou mettre en danger un enfant. Une fois on faisait une distribution de repas, je servais avec une forte cadence parce qu’il fallait remplir les assiettes de 120 enfants. Mon tuteur m’a arrêtée et m’a dit d’aller faire un tour. Sans m’en apercevoir, avec la pression et suite à une bagarre, j’avais accumulé un surplus d’émotions et je n’allais pas bien. Il avait toujours ces réflexes là. Il savait trouver le bon équilibre, à me pousser quand il m’en sentait capable et à me dire de me reposer lorsque j’allais moins bien. C’était un excellent tuteur.

On a créé des liens très forts, encore aujourd’hui je parle avec des collègues de l’association. C’est la meilleure expérience que je pouvais avoir en premier stage sur le terrain, ça me permet de me dire « Je sais pourquoi je suis venue ici, pourquoi je fais ça, j’ai des objectifs ».


* Le prénom a été modifié.

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